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AIDS at the core of globalization

Tuesday 16 December 2003 by De Beer de Laer, Daniel

reference http://www.imbroglio.be/site/spip.php?article44

In this paper on "Access to drugs" (HIV/AIDS) in Southern countries I (Daniel de Beer) focus on intellectual property rights. Although it is not precisely the concern of our IAP it maybe could interest you. The story of the fight to achieve a right (not reached yet) shows actually how important the "ground social forces" are and how they play an important role at all levels. All stakeholders need to act within a network or at least to work connected together. The globalization is at stake in the same way as for GMOs issues. In other respect a point arises altogether not appearing on the paper. I wonder if we (our governments) did not leave it up to big firms to do scientific research. I mean big pharmaceutical industries as well as seed manufacturers "are" the research. They are the only ones able to carry out research into medicine or biotechnology. Is the patent system the cause or the result of this, or both ? (The original version of this text has footnotes)

Le sida au coeur de la mondialisation ?

Daniel de Beer

Le sida, c’est d’abord la r?alit? quotidienne effrayante qui se cache derri?re la froideur des chiffres : une personne qui succombe toutes les dix secondes, quatorze mille nouvelles contaminations par jour, quarante millions de personnes touch?es... Il y a quelques ann?es, le sida ?tait une menace plan?taire. Grosso modo, les pays riches ont pu endiguer l’?pid?mie. Aujourd’hui, le sida est essentiellement l’affaire des pays pauvres : 95% des personnes touch?es vivent dans les pays en voie de d?veloppement. Le sida, c’est donc "des m?dicaments dans les pays du Nord et des cercueils dans les pays du Sud" . Le sida serait-il devenu un nouvel enjeu des relations nord-sud et de la mondialisation ? Malheureusement oui. La mobilisation internationale pour lutter contre cette pand?mie, certes insuffisante mais r?elle, cahote et calle r?guli?rement sur un point essentiel, entre les mains des pays du nord : le statut juridique des m?dicaments. Ces pr?cieuses mol?cules, symboles de vie, valent de l’or pour la poign?e de firmes pharmaceutiques qui les ont brevet?es. Le scandale ne tient pas seulement ? ce que le sida, cette catastrophe sanitaire la plus d?vastatrice depuis le Moyen Age, continue ? s’amplifier, mais ? ce que la lutte contre l’h?catombe est s?rieusement entrav?e par de purs int?r?ts mercantiles puissamment appuy?s par les pays riches. Il faudrait pourtant si peu pour changer la donne !

Le sida, la tuberculose, la malaria et bien d’autres font des ravages dans les pays en voie de d?veloppement et sont en passe de d?truire des nations enti?res. Un grand nombre des m?dicaments qui permettraient d’y mettre fin existent mais sont vendus trop chers et 1% seulement des personnes touch?es y ont acc?s. Certes, la question de l’acc?s ? ces m?dicaments vitaux est complexe et ne se limite pas ? celle de leur prix de vente. On a dit avec beaucoup de justesse combien le courage politique des gouvernements est essentiel, tout comme sont indispensables les infrastructures et les ressources humaines pour dispenser les soins, ainsi que les politiques de pr?vention. Il faut aussi ?voquer l’importance des campagnes pour briser la loi du silence et mettre fin ? la stigmatisation et ? la honte qui r?gnent encore dans ces pays vis-?-vis de ceux qui sont atteints. N?anmoins, l’acc?s ? des m?dicaments financi?rement abordables demeure un pr? requis incontournable, sans lequel aucune politique de sant? publique n’a de sens.

Il faut accorder toute leur importance aux termes "politique de sant? publique" car c’est l? que se joue la diff?rence entre l’assistanat et le d?veloppement, l’?ph?m?re ou le durable, la charit? ou la reconnaissance effective d’un droit. Un aspect crucial de toute politique de sant? publique est le syst?me juridique qui assure ? un pays la possibilit? de fabriquer ou d’importer des m?dicaments ? un prix le plus abordable possible au regard de ses finances publiques et des possibilit?s de sa population. Or le prix annuel d’un m?dicament peut varier de 70 ? 1 selon son statut juridique et le march? o? il est mis en vente. Une trith?rapie contre le sida co?te 10.000 euro aux Etats-Unis, march? florissant o? les firmes pharmaceutiques fixent leurs prix quasi librement. En revanche, la trith?rapie peut descendre ? 140 euro s’il s’agit de m?dicaments copi?s achet?s en grand nombre aux entreprises du sud qui les produisent. 140 euro, c’est le prix que demandent les fabricants indiens de m?dicaments g?n?riques. Il vaut la peine de s’y attarder un instant, car le traitement g?n?rique offert a d’autres m?rites non n?gligeables.

Pour l’appr?cier, il faut tenir compte de trois facteurs. Le premier est qu’il existe trente-cinq sch?mas th?rapeutiques utiles dans la lutte contre le sida. Les trith?rapies les plus efficaces sont compos?es de plusieurs m?dicaments, ing?r?s selon une savante combinaison. Dans les pays du nord, les patients prennent diff?rents m?dicaments composant ensemble la trith?rapie salvatrice, en suivant un protocole, c’est-?-dire des modalit?s tr?s pr?cises demandant un suivi m?dical. Ce protocole est extr?mement difficile ? mettre en œuvre dans les pays o? l’encadrement sanitaire est pour le moins rudimentaire. Le deuxi?me facteur tient au statut juridique de ces diff?rents m?dicaments. Les uns appartiennent ? telle entreprise pharmaceutique, les autres ? telle autre et les troisi?mes ne sont plus prot?g?s par des brevets. Or, sans rentrer d?s ? pr?sent dans le d?tail, les fabricants de m?dicaments g?n?riques de pays du sud, comme l’Inde, b?n?ficient actuellement d’une marge de manœuvre par rapport ? ce statut juridique des m?dicaments, fussent-ils encore sous brevet. C’est le troisi?me facteur. Certains de ces fabricants ont pris l’heureuse initiative de cr?er un m?dicament unique : une seule pilule, ? prendre deux fois par jour, contenant une synth?se des diff?rents m?dicaments n?cessaires. C’est une v?ritable aubaine : une commodit? d’emploi ind?niable alli?e ? un prix d?fiant toute concurrence.

Ces donn?es factuelles ouvrent la voie ? bien des questions. Pourquoi les pays d?sargent?s et d?cim?s par le sida ne recourent-ils pas tous ? ces pilules ? Pourquoi l’Organisation mondiale de la sant? (OMS), qui vient de lancer un ambitieux programme de lutte contre le sida, compte-t-elle dans ses calculs pr?s de 400 euro pour un traitement annuel, et non 140 ? Hormis pour financer les campagnes, en quoi la Belgique, l’Europe, les pays du nord sont-ils sp?cialement concern?s ? Pour tenter d’y voir plus clair, il est n?cessaire de faire un d?tour par la guerre des brevets (1), d’examiner ensuite les politiques suivies par les firmes pharmaceutiques (2), les organisations internationales (3) et les grands de ce monde que sont les Etats-Unis et l’Europe (4). Il n’y a pas de fatalit? (5), mais un changement d’attitude des pays de nord est indispensable (6).

1. La guerre des brevets

C’est en mars 2001 que le drame du sida dans les pays du tiers-monde et l’?go?sme des firmes pharmaceutiques ont choqu? la conscience internationale. On se souviendra qu’? l’?poque, trente-neuf firmes pharmaceutiques, fortement soutenues par les menaces de repr?sailles ?conomiques des Etats-Unis et de l’Union Europ?enne, avaient d?cid? de faire proc?s au gouvernement sud-africain. Ce dernier ne voulait rien d’autre que fonder une politique de sant? publique adapt?e au pays en utilisant les m?canismes offerts par le droit international. La formidable mobilisation d’associations sud-africaines, dont la Campagne d’action pour les traitements (TAC) et d’organisations non gouvernementales comme M?decins sans fronti?res (MSF), OXFAM et Health Gap a suscit? une telle r?probation mondiale, que les firmes pharmaceutiques et leurs alli?s ont ?t? contraints de mettre bas les armes. L’ampleur des drames li?s au sida dans les pays du sud a ?t? r?v?l?e au grand jour, au prix d’un s?rieux coup de canif port? ? l’image des firmes pharmaceutiques. Un vent d’optimisme a commenc? ? souffler, il semblait possible de faire passer le droit ? la vie avant le droit aux profits. La bataille ne faisait pourtant que commencer…

Le nœud du probl?me g?t dans le refus obstin? des firmes pharmaceutiques de laisser simplement copier et distribuer leurs m?dicaments prot?g?s par brevets, f?t-ce de mani?re temporaire et g?ographiquement limit?e aux pays d?sargent?s touch?s par les d?sastres sanitaires. Plus largement, il s’agit d’une guerre sans merci men?e par les firmes pharmaceutiques contre "les g?n?riques", ces m?dicaments copi?s, et contre tout syst?me qui en p?renniserait le recours. Ces firmes se justifient principalement par les ann?es de recherches et les investissements consid?rables n?cessaires pour cr?er un m?dicament. Un retour sur investissements serait donc indispensable pour pr?server cette capacit? de recherche. En l’occurrence, cet argument est peu cr?dible. 90% du chiffre d’affaire se r?alise dans les pays du nord. L’Afrique, la plus touch?e par les d?sastres sanitaires, n’intervient que pour 1%. En dehors du sida, ces firmes ne consacrent d’ailleurs qu’une partie infime de leur budget de recherche aux maladies dites n?glig?es, parce qu’elles frappent le sud et ?pargnent le nord. La v?rit? est plus prosa?que. Sup?rieur ? 18%, le b?n?fice annuel sur investissement des firmes pharmaceutiques est le plus haut de toutes les entreprises. Cette valeur ajout?e est obtenue gr?ce au r?gime de brevet. Les firmes pharmaceutiques luttent d?s lors contre tout ce qui pourrait remettre en cause leur monopole, f?t-ce localement, car elles craignent ? terme un effet de contagion. Elles ne veulent donc en aucun cas courir le moindre risque de voir remettre en cause ce syst?me. Malheureusement, gr?ce ? une puissante politique de lobby et d’int?ressement, ces firmes peuvent compter sur l’appui sans faille de quelques Etats, les Etats-Unis ? leur t?te, et dans une mesure f?cheusement non n?gligeable l’Europe.

Droit des brevets contre droit ? la vie

Le cheval de bataille des firmes pharmaceutiques et de leurs commensaux est l’accord portant sur les "aspects des droits de propri?t? intellectuelle qui touchent au commerce" (Accord ADPIC, parfois mieux connu sous son acronyme anglais TRIPS Agreement). Il constitue un des piliers du syst?me "OMC" (Organisation mondiale du commerce) mis en place en 1994. Grosso modo, cet accord conf?re au titulaire d’un brevet sur un m?dicament l’exclusivit? de la commercialisation pendant une dur?e minimum de vingt ans.

Toutefois, contrairement ? ce qu’on pense g?n?ralement, le texte de l’ADPIC pr?voit des processus de contournement des obstacles li?s aux brevets en cas de probl?me grave de sant? publique. Les Etats-Unis et l’Europe sont d’ailleurs les plus gros utilisateurs de ces m?canismes d?rogatoires.

Parmi d’autres, la licence obligatoire et l’usage gouvernemental sont des moyens qui permettent de limiter les privil?ges li?s aux brevets. Confront? ? un probl?me sanitaire, un pays peut autoriser sur son territoire l’importation ou la fabrication de produits g?n?riques copi?s du m?dicament sous brevet sans l’accord de son titulaire, le cas ?ch?ant moyennant une modeste redevance.

D’autre part, l’Accord ADPIC octroie aux pays en voie de d?veloppement des p?riodes de transition pour int?grer cet accord dans leur l?gislation interne. C’est ainsi que les quarante-neuf pays "les moins avanc?s" de la plan?te ne sont pas li?s par l’Accord ADPIC jusqu’en 2016 ou que, par la conjonction de diff?rents facteurs, des pays comme l’Inde peuvent produire jusqu’en 2005 des copies g?n?riques de m?dicaments sous brevets sans m?me devoir recourir aux licences obligatoires. En r?alit?, les termes de l’accord ADPIC n’auraient du offrir du grain ? moudre aux juristes que sur un point : lorsqu’un pays recourt ? une licence obligatoire pour fabriquer des copies de m?dicaments sous brevet, la production doit r?pondre principalement aux besoins int?rieurs . Les possibilit?s d’exporter ces copies de m?dicaments vers un pays qui en a un cruel besoin s’en trouvent ainsi drastiquement limit?es. La question est ?videmment cruciale pour de nombreux pays d?sargent?s d?pourvus de l’infrastructure industrielle ad?quate pour produire localement ces m?dicaments complexes.

Des victoires obtenues ? l’arrach?e

La d?b?cle des firmes pharmaceutiques ? Pretoria avait ouvert la voie. Le contexte international de l’?poque et l’?chec de la Conf?rence minist?rielle de l’OMC ? Seatle en 1999, ont permis aux pays en voie de d?veloppement d’aller de l’avant lors la Conf?rence minist?rielle suivante, au Qatar en 2001. La D?claration de Doha du 14 novembre a confirm? le principe selon lequel l’Accord ADPIC "peut et devrait ?tre interpr?t? et mis en œuvre d’une mani?re qui appuie le droit des membres de l’OMC de prot?ger la sant? publique et, en particulier, de promouvoir l’acc?s de tous aux m?dicaments" . En r?alit?, la D?claration de Doha ne fait rien d’autre que confirmer un texte clair. On lui pr?tait toutefois une port?e symbolique et politique consid?rable, ouvrant les plus grands espoirs. La question des exportations de m?dicaments copi?s, si importante pour les pays non producteurs, n’a quant ? elle pas ?t? r?solue, mais au moins y a-t-il eu l’engagement ferme d’y trouver une solution n?goci?e dans les douze mois. Malheureusement, la r?sistance opini?tre des pays riches et des firmes pharmaceutiques a fait capoter toutes les n?gociations jusqu’? l’?t? 2003.

Un accord a finalement ?t? sign?, in extremis et ? l’arrach?e, au si?ge de l’OMC ? Gen?ve le 30 ao?t 2003. Cet accord fixe les modalit?s sous lesquelles l’exportation de copies bon march? de m?dicaments brevet?s est autoris?e vers les pays qui n’ont pas la capacit? de les produire eux m?mes.

L’Accord du 30 ao?t : historique ou victoire en trompe l’œil ?

Cet Accord du 30 ao?t est-il "historique", "?quilibr?" et "vital"? Constitue-t-il enfin la base juridique et politique solide qui permettra aux pays les plus touch?s par le cataclysme du sida et les autres d?sastres sanitaires, de lever un des obstacles majeurs ? l’acc?s des m?dicaments pour les plus pauvres, sans risquer les repr?sailles du lobby pharmaceutique et de ses alli?s ?

Cet Accord l?ve effectivement l’ambigu?t? du texte de l’Accord ADPIC en autorisant les pays producteurs de copies bon march? de m?dicaments brevet?s, ? les exporter vers les pays qui n’ont pas la capacit? de les fabriquer eux-m?mes. Malheureusement, les modalit?s ? mettre en œuvre rel?vent de la course d’obstacles. Elles sont complexes, et m?me fort complexes pour des pays d?pourvus d’une solide infrastructure administrative. En effet, tant le pays demandeur que le pays exportateur doivent ?mettre une licence obligatoire assortie d’un luxe de d?tails ? communiquer ? l’OMC. Cette obligation de transmission pr?alable de renseignements ? l’OMC est inhabituelle. Elle est source d’inqui?tude car les acteurs hostiles ? l’accord risquent d’en faire leur miel pour contrer la mesure envisag?e.

Les clauses sp?cifiant les crit?res ? r?unir pour b?n?ficier du syst?me sont ?galement dangereuses car elles sont sujettes ? diverses interpr?tations. D’une part, sauf s’il est du groupe des "moins avanc?s", le pays demandeur doit prouver qu’il n’a pas la capacit? de produire lui-m?me les copies du m?dicament dont il a besoin. Comment ?valuer cette capacit? industrielle ? Par exemple, l’encre de l’accord n’?tait pas s?che que les Etats-Unis annon?aient leur refus de reconna?tre ce droit aux Philippines.

D’autre part, le pays exportateur doit s’engager ? vendre ? des fins qui ne sont "ni industrielles, ni commerciales" . Quelle est la port?e de ces termes pour des pays qui ont du embrasser de bon gr? ou non les principes de l’?conomie lib?rale ? Sous quelle forme r?percuter pareille exigence sur les entreprises industrielles et commerciales qui produisent les m?dicaments copi?s ? L’exp?rience montre qu’il faut au contraire assurer une comp?tition commerciale entre les producteurs de m?dicaments, qu’ils soient d’origine ou copi?s, pour obtenir de substantielles r?ductions de prix. C’est d’ailleurs ainsi que le prix annuel d’une trith?rapie peut ?tre divis? par 70. Enfin, cet Accord ne concerne que les m?dicaments et non les vaccins, ni ce qui touche aux diagnostics. Complexit? de mise en œuvre, incompl?tude, incertitude de certaines dispositions…L’Accord du 30 ao?t n’est-il donc qu’une victoire en trompe l’œil ? Sera-t-il un nouveau coup de pioche inutile, donnant lieu, une fois encore, ? une sordide guerre de tranch?es o? toute tentative de mise en œuvre est d?courag?e et combattue ? On verra que la r?ponse est nuanc?e et qu’elle d?pendra en bonne partie de l’attitude des pays du nord…

2. Les firmes pharmaceutiques modifient leur strat?gie

Echaud?es par l’aventure sud-africaine, les firmes pharmaceutiques ont chang? de strat?gie. Elles affichent moins ouvertement leur hostilit? "aux g?n?riques". Pour redorer leur blason, elles ont annonc? ? grand bruit en mai 2000 qu’elles adoptaient des politiques de rabais diff?renci?s sur plusieurs m?dicaments vitaux pour la lutte contre le sida en faveur des pays les plus pauvres. L’initiative, appel?e "Access", aurait pu ?tre excellente, car bien que ces m?dicaments restaient plus chers que les produits copi?s, ils pouvaient concourir ? une baisse g?n?ralis?e des prix et pallier des insuffisances d’approvisionnement des march?s locaux. Un an plus tard, le r?sultat ?tait pour le moins mitig? : seules vingt-cinq mille sur les quatre millions de personnes concern?es dans les onze pays choisis avaient b?n?fici?… au moins "une fois" d’un traitement. Moins avouable ?tait que certaines des firmes en profitaient pour tenter de d?crocher avec ces pays des accords secrets, visant par exemple ? interdire l’importation de m?dicaments g?n?riques pour les maladies opportunistes (les maladies meurtri?res auxquelles le corps affaibli par le VIH ne peut r?sister). Ce programme a eu n?anmoins le m?rite de montrer que les firmes pharmaceutiques ne constituent pas un bloc monolithique imperm?able ? toute sensibilit?. L’OMS et l’ONUSIDA ont collabor? ? cette initiative en lui assurant une certaine coh?rence. Cependant, ? l’?poque, ces organisations internationales n’ont peut-?tre pas suffisamment pris garde ? ses effets pervers. Fondamentalement, par des dons limit?s et provisoires, ce type de programme a davantage pour effet de d?stabiliser plut?t que de soutenir la mise en place de politiques de sant? publique coh?rentes et structur?es.

Actuellement encore, certaines entreprises pharmaceutiques adoptent des politiques de rabaissement de prix de m?dicaments contre le sida pour les pays pauvres, sans toutefois devenir concurrentiels avec les ?quivalents g?n?riques. Il est vrai que le sida dans les pays du sud pourrait devenir un march? non d?nu? d’int?r?t. L’administration Bush a en effet promis de d?bloquer quinze milliards de dollars en cinq ans pour lutter contre le sida. Il n’y a aucune chance de voir cette manne tomber dans l’escarcelle des fabricants de m?dicaments g?n?riques, qualifi?s de pirates par le Pr?sident am?ricain . En l’occurrence, ces entreprises se positionnent ainsi pour devenir les fournisseurs attitr?s des m?dicaments achet?s gr?ce aux fonds promis par Georges Bush, m?me si ce dernier cherche ? pr?sent ? ren?gocier le montant promis.

Quoiqu’il en soit de leur agenda, il est tr?s souhaitable que les firmes pharmaceutiques restent en lice. En effet, on ne peut aujourd’hui faire l’impasse sur le facteur ?conomique. Les fabricants de g?n?riques ne sont pas des philanthropes; ce sont des industriels qui se positionnent sur un march? prometteur. Les lois de la concurrence jouent pleinement et les poussent ? diminuer leurs prix au maximum. Une r?cente ?tude conjointe de M?decins Sans Fronti?res et de l’Organisation Mondiale de la Sant? portant sur dix pays pauvres frapp?s par la pand?mie du sida, d?montre de mani?re robuste que les prix les plus bas sont obtenus quand il y a comp?tition entre plusieurs fabricants de g?n?riques et plusieurs firmes pharmaceutiques.

3. L’OMS et l’ONUSIDA

Dans pareil contexte, les organisations internationales comme l’OMS et l’ONUSIDA se retrouvent en position d?licate. Apr?s bien des ann?es d’inertie, elles se sont lanc?es s?rieusement dans la bataille en cr?ant un Fonds global relay? par l’initiative "3 millions (de personnes soign?es) d’ici ? 2005" . Ces organisations sont bien conscientes des m?rites th?rapeutiques et financiers des traitements g?n?riques ? 140 euro annuels. Il faut d’ailleurs souligner combien la lutte a ?t? ?pre pour que "le rendement" et la recherche de "produits au plus bas prix" figurent parmi les principes fondateurs du Fonds.

Ces principes se traduisent dans les actes : le Fonds est aujourd’hui le principal bailleur qui accepte de financer "les g?n?riques". Cette ouverture du Fonds vis-?-vis des g?n?riques est d’ailleurs une des raisons qui poussent l’administration am?ricaine ? privil?gier des dons ou des appuis bilat?raux, plut?t que de passer par ces organisations internationales et le Fonds mondial. Cette approche bilat?rale permet aussi de peser sur les pays b?n?ficiaires pour qu’ils sauvegardent un r?gime strict de protection des brevets. L’administration am?ricaine et les firmes pharmaceutiques n’ont pas pour autant abandonner tout espoir de reprendre le contr?le du Fonds mondial ou d’en influencer la politique. Dans les coulisses, la bataille fait toujours rage. Malgr? leur autonomie relative, ces organisations internationales demeurent tributaires des rapports de force au sein des Nations Unies et elles ne peuvent pas se f?cher avec leurs puissants donateurs… Le Fonds n’a donc pas seulement besoin de contributions financi?res, mais aussi d’un appui politique clair. Ce support se justifie d’autant plus qu’il faudra encore longtemps avant que les pays d?cim?s par le sida, la tuberculose et la malaria, g?n?rent suffisamment de ressources pour pouvoir se passer de soutiens ext?rieurs.

L’?troitesse de la marge de manœuvre de ces organisations internationales se traduit parfois par certaines ambigu?t?s. Par exemple, en d?pit des heureuses perspectives financi?res et th?rapeutiques offertes par la nouvelle m?dication, elles sont contraintes de compter une moyenne annuelle de 400 euro pour un traitement, calcul?e en tenant ?galement compte des prix pratiqu?s par les firmes pharmaceutiques dans les pays du sud. L’OMS le justifie en avan?ant qu’il appartiendra ? chaque pays de choisir le type et donc le co?t du traitement propos? ? la population. En th?orie, c’est exact. Mais ces pays disposent-ils vraiment d’une pleine libert? de choix?

4. L’administration am?ricaine dans la bataille

On arrive ainsi ? un probl?me cardinal qui fait obstacle ? l’acc?s aux m?dicaments essentiels. A coup de pressions, menaces et chantages, et parfois aussi sous la perverse influence d’une assistance technique dite d?sint?ress?e, un nombre grandissant de pays sont amen?s ? adopter des l?gislations renfor?ant consid?rablement la protection conf?r?e aux droits de propri?t? intellectuelle. Aucune ?tude s?rieuse ne peut attester de l’int?r?t ?conomique de ces mesures pour ces ?conomies nationales. Quoiqu’il en soit, elles ont en tout cas des cons?quences catastrophiques en terme d’acc?s aux soins de sant? vitaux. Par exemple, quatorze pays de l’Afrique de l’ouest, reconnus de la famille des Etats les plus pauvres de la plan?te, sont li?s depuis le mois de f?vrier 2002 par un nouvel Accord de Bangui. Non seulement celui-ci les prive de la facult? d’attendre 2016 pour mettre en œuvre l’Accord ADPIC, mais il contient des dispositions dont l’effet est de rendre bien plus difficile et parfois impossible la mise en œuvre des m?canismes d?rogatoires pr?vus par le texte de l’OMC. Cet Accord de Bangui, exemple de ce qu’on appelle un "ADPIC plus", a ?t? con?u par l’Office mondial de la propri?t? intellectuelle (OMPI), agence onusienne fortement financ?e par l’industrie et ardente avocate d’un syst?me mondial strict de protection des droits intellectuels.

La toute puissance administration am?ricaine

Aujourd’hui le gouvernement am?ricain met toute sa puissance en jeu pour convaincre trente-quatre pays d’Am?rique latine de signer un accord cr?ant la Zone de libre-?change des Am?riques (ZLEA). Cette convention r?duirait fortement la possibilit? pour ces pays d’importer des copies de m?dicaments vitaux, quel que soit le drame sanitaire dans lequel ils sont plong?s. Le nombre d’accords bilat?raux sign?s par les Etats-Unis va croissant. En fait, depuis le vote en juillet 2002 de la loi qui exige d’un partenaire commercial un niveau de protection de la propri?t? intellectuelle ?quivalent ? celui des Etats-Unis et laisse la main libre ? l’ex?cutif pour la mise en œuvre commerciale, l’administration Bush a charg? son repr?sentant pour le commerce, Robert Zoellick, de n?gocier dans le monde entier des accords de libre-?change comportant des dispositions bien plus restrictives que celles de l’ADPIC. Une vingtaine de pays du sud ont sign? ou en sont sur la voie.

Au besoin, l’administration am?ricaine n’h?site pas ? recourir aux repr?sailles ?conomiques. La Tha?lande par exemple en a fait la douloureuse exp?rience. Ce pays, qui compte plus d’un million de personnes atteintes par le VIH, a tout ? fait l?galement produit un antiretroviral copi? d’un m?dicament sous brevet (la didanosine). Les r?torsions am?ricaines ne se sont pas fait attendre. Apr?s avoir perdu cent soixante cinq millions de dollars sur leurs exportations vers les Etats-Unis, la Tha?lande a du se r?soudre ? abandonner la production des pilules salvatrices pour un traitement en poudre, ? l’usage bien plus incommode, mais non couvert par un brevet. En Cor?e du Sud, le traitement qui prolonge la vie des personnes atteintes de la leuc?mie co?te 50.000 euro par an. Les malades se sont mobilis?s et ont convaincu le ministre de la Sant? publique de mettre en place une licence obligatoire au profit d’un fabricant indien de m?dicaments copi?s, vendus ? un prix dix fois inf?rieur. La firme propri?taire du brevet a fait pression et a obtenu l’appui de l’administration am?ricaine. Le ministre de la Sant? a ?t? d?mis de ses fonctions et on ne parle plus de cette licence obligatoire. Les exemples peuvent ?tre multipli?s et la liste des initiatives de l’administration am?ricaine s’allonge chaque jour davantage. L’Europe n’est pas en reste. A Pretoria et ? Doha en 2001, tout comme lors des n?gociations qui ont abouti ? l’Accord du 30 ao?t 2003, la Communaut? europ?enne a toujours commenc? par se ranger aux c?t?s de ceux qui veulent emp?cher ou limiter au maximum les possibilit?s juridiques des pays du sud d’avoir un acc?s ais? aux m?dicaments vitaux. De mani?re moins agressive qu’aux Etats-Unis, elle n’en d?ploie pas moins une intense activit? diplomatique de promotion de syst?mes "ADPIC plus" ? travers des accords bi ou plurilat?raux.

Il n’est pas difficile de comprendre pourquoi ces Etats du sud se plient ? pareilles exigences. Les r?ponses sont plurielles : le poids des pressions et la peur des repr?sailles; l’espoir d’engranger les b?n?fices de leur subordination aux exigences des pays donateurs; l’?troitesse de la marge de manœuvre des gouvernements ?trangl?s par la dette; le manque d’expertise… et malheureusement pour nombre d’entre eux un manque de volont? politique, voire m?me l’achat de la "volont? politique" par les firmes pharmaceutiques.

5. L’inqui?tude et non le fatalisme…

Le tableau qui vient d’?tre bross? est sombre. Faut-il c?der au d?couragement? A premi?re vue tout y incite. Les progr?s engrang?s jour apr?s jour ne parviennent m?me pas ? enrayer l’expansion de l’?pid?mie. Les acteurs les plus puissants campent sur leur hostilit? visc?rale ? l’instauration de syst?mes juridiques propices ? favoriser l’acc?s aux m?dicaments vitaux. Les pays riches rechignent ? respecter leurs engagements financiers…
Heureusement, la r?alit? est plus contrast?e.

La rage de vivre

Les aspects juridiques et internationaux constituent le fil conducteur de cet article, au prix d’une injustice qui doit ?tre d?voil?e. On y parle bien trop peu des acteurs essentiels. L’?pid?mie du sida comporte en effet un volet plus lumineux. Les personnes atteintes et leurs amis se sont regroup?s ? mille et un endroits du monde et ils se sont impos?s comme acteurs et comme partenaires. Ce sont eux qui les premiers ont us? leur voix et les trottoirs de Pretoria en 2001 jusqu’? ce qu’ils soient entendus dans le monde entier. Ce sont eux qui continuent ? lutter pour ?tre pris en juste consid?ration par les politiques et les institutionnels de tous les ?chelons. Ce sont eux encore qui les premiers inventent des formes de "vivre ensemble avec la maladie" qui bousculent la conception mondiale de la m?decine et de la pharmacie. Cette force ne s’arr?tera pas de sit?t… Il ne faut pas se tromper : tous les progr?s arrach?s depuis quatre ans sont des victoires de la rue avant d’?tre celles de la diplomatie internationale. Les exemples sont l?gions. Parmi eux, la lutte de l’association sud-africaine Treatment Action Campaign (TAC) est embl?matique. A l’origine de la mobilisation qui a contraint les firmes pharmaceutiques ? abandonner le proc?s men? ? Pretoria en 2001, c’est aussi au prix d’une longue lutte juridique contre son propre gouvernement, magistralement orchestr?e avec la pression de la rue, que TAC a largement contribu? ? ce que le gouvernement sud-africain adopte enfin une politique de soins digne de ce nom.

La mobilisation d’associations, d’ONG, d’universit?s, d’h?pitaux…

Il ne faut pas davantage sous-estimer l’immense travail r?alis? quotidiennement par les organisations non gouvernementales internationales, et par d’autres groupements, organismes ou universit?s plus discrets, nombreux ? s’?tre engag?s dans la bataille. Acteurs parfois m?connus, leur r?le n’en est pas moins d?terminant tant localement qu’internationalement. Si leurs r?sultats "sur le terrain" sont encore d?risoires face ? l’?tendue de la t?che, ils n’en attestent pas moins de ce que la r?ussite peut ?tre au rendez-vous. Pour nombre d’entre eux, le sida a d’ailleurs ?t? l’occasion d’une petite r?volution. En effet, pour ?tre efficaces, il ne suffit plus d’?tre m?decins, ou juristes, ou ?conomistes, ou lobbyistes, il faut ?tre tout cela ? la fois. Elargir ses comp?tences ; accepter de sortir de sa sp?cialit? ou cr?er des synergies et des r?seaux ; c?toyer, relayer et amplifier aux ?chelons sup?rieurs les mobilisations et les initiatives locales… C’est ainsi qu’ils ont pu faire la preuve de ce qu’ils pouvaient jouer avec succ?s un triple r?le : soigner et montrer que c’est possible, soutenir des dynamiques locales, ?veiller la conscience publique et politique, apporter une expertise technique et juridique aux pays qui en ont besoin, appuyer et renforcer "sur le terrain" les Etats qui ont le courage de tenter de mettre en place des politiques de sant? publique plus efficaces, et parfois m?me convaincre les gouvernements r?ticents de s’engager dans cette voie.

La prise de conscience et la mobilisation de pays du sud

Depuis quelques ann?es, le Br?sil m?ne une politique consid?r?e comme exemplaire en mati?re de sida. Apr?s avoir longtemps d?fendu des opinions born?es en la mati?re, le Pr?sident sud-africain a enfin accept? de lancer un programme d’action national destin? ? endiguer la pand?mie. Le Pr?sident chinois reconna?t publiquement le probl?me… Les pouvoirs nationaux ont souvent une tr?s lourde responsabilit? dans la mani?re dont les d?sastres sanitaires ont ?t? n?glig?s. Cependant, l’action de la soci?t? civile et des organisations nationales et internationales commence ? porter des fruits. Les exemples d’une meilleure prise de conscience des dirigeants augmentent et le terrain devient lentement plus propice ? des actions plus structur?es…

L’initiative de la Fondation Clinton

D’autres initiatives s’ajoutent ? ce travail encourageant. En octobre 2003, la Fondation Clinton a annonc? la mise en place d’un vaste programme d’achats de m?dicaments g?n?riques au profit de quatorze des pays les plus touch?s par le VIH/sida. Ces m?dicaments sont achet?s en grande quantit? aupr?s de fabricants de m?dicaments g?n?riques. Trois compagnies indiennes et une sud-africaine ont ?t? s?lectionn?es comme partenaires. Dans un contexte international difficile, la l?gitimit? de recourir "aux g?n?riques" dans les pays du sud b?n?ficie de la sorte d’un pr?cieux appui. Men? en collaboration ?troite avec l’OMS et ONUSIDA, le programme de la Fondation Clinton a ?galement la vertu de s’int?resser ? toute la cha?ne de distribution des m?dicaments, qui part du fabricant jusqu’aux malades, en passant par les syst?mes de distribution et d’encadrement des soins. L’entreprise a malheureusement une grosse limite : il n’est pas question d’aider les pays ? modifier leur l?gislation pour la rendre compatible avec l’Accord du 30 ao?t.

6. … mais il est urgent de changer la donne !

On en revient ainsi ? ce fameux Accord du 30 ao?t 2003. On a vu qu’il n’est pas une panac?e. Pourtant, aussi limit? et imparfait soit-il, il est aujourd’hui la base juridique internationale sur laquelle les pays du sud peuvent adapter leur l?gislation nationale sur les brevets. Pour les pays qui n’ont pas la capacit? de fabriquer des m?dicaments eux-m?mes, il est un des fondements sur lequel construire une politique de sant? publique. Pour ces pays, un enjeu substantiel est aussi de ne pas se condamner ? ?tre ?ternellement tributaires de la seule g?n?rosit? internationale. Sans pour autant abandonner la lutte pour l’am?liorer et l’?largir, il faut donc utiliser et fortifier cet Accord. Con?u comme une concession faite du bout des l?vres ? l’usage exclusif des pays du sud, il faut le consacrer comme un outil juridique normal, de routine, tant sur le plan mondial qu’? l’?chelon national.

A cet ?gard, une heureuse surprise est venue du Canada. Au prix d’une modification l?gislative int?grant l’Accord du 30 ao?t, le gouvernement s’est engag? ? permettre et ? favoriser sur son sol la production de m?dicaments g?n?riques, fussent-ils encore sous brevets, au profit des pays en voie de d?veloppement qui en ont besoin. En d?cembre 2003, le projet de loi ?tait encore en discussion au Parlement canadien. Toutefois, ce projet pr?te le flanc ? deux critiques. D’abord, la loi ne s’appliquerait qu’? une liste limit?e de m?dicaments. Ensuite, et ce point est tr?s important, le texte pr?voit un m?canisme dont l’effet serait de laisser aux firmes pharmaceutiques titulaires des brevets qu’on veut copier, la possibilit? de bloquer les fabricants de g?n?riques. En d’autres termes, il deviendrait tr?s difficile d’assurer ? ces industriels la s?curit? juridique propice ? une politique de prix et d’investissements dynamiques. L’affaire n’est pas donc gagn?e. Le lobby pharmaceutique est puissant au Canada et il peut compter sur l’appui de l’administration du grand voisin am?ricain qui risque fort d’y voir une entorse ? l’Accord de libre-?change liant les deux pays.

Men?e ? bon port, l’entreprise canadienne modifierait consid?rablement la donne! D’abord bien s?r par l’arriv?e d’un nouvel acteur dans la fabrication et la diffusion de m?dicaments vitaux ? bas prix. Ensuite et peut-?tre surtout, par sa valeur d’exemple : il s’agirait d’un formidable encouragement pour les pays du sud ? oser se pr?valoir des facilit?s que leur reconnaissent l’Accord ADPIC, la D?claration de Doha et l’Accord du 30 ao?t. Les pays qui veulent r?sister aux "ADPIC plus" que les ex?cutifs am?ricains ou europ?ens cherchent ? leur imposer s’en trouveraient renforc?s. Les quelques pays du sud qui ont la possibilit? jusqu’en 2005 de fabriquer des m?dicaments copi?s, et qui les exportent aujourd’hui vers d’autres pays d?munis non producteurs, pourraient ?galement s’en inspirer pour l’avenir.

Encore l’initiative canadienne ne fera-t-elle vraiment sens que si elle n’est pas isol?e. Tous les pays sont concern?s. Par une modeste modification l?gislative, la Belgique et les autres pays europ?ens pourraient faire de m?me. Bien s?r, en fait de production de m?dicaments, la Belgique ne p?se pas d’un grand poids. L’important est de prendre juridiquement acte de ce que la reconnaissance d’un droit vaut qu’on r?gule autrement le commerce international et un de ses piliers que constitue le droit des brevets.

Les effets catastrophiques du sida et des autres maladies meurtri?res dans les pays du sud ne sont donc pas une fatalit?. Oui, il est encore possible pour la majorit? des pays de r?sister aux accords de type "ADPIC plus", ou d’accommoder leur l?gislation ? l’Accord du 30 ao?t. Oui, avec l’appui international, il est possible pour les pays du sud d’adopter progressivement des politiques de sant? publique efficientes et, ? plus long terme, p?rennes. Bien s?r, le Fonds mondial contre le sida, la tuberculose et la malaria, lanc? en avril 2001 par Kofi Annan, m?rite un soutien politique et financier plus important, assorti de conditions qui en emp?chent le d?voiement au profit des firmes pharmaceutiques. Enfin, et c’est essentiel, il ne faut pas garder les yeux uniquement riv?s vers les pays du sud. Les parlements et les gouvernements occidentaux, ainsi que les institutions europ?ennes, ne peuvent plus se contenter de voter des r?solutions de bon aloi. L’Accord du 30 ao?t fait int?gralement partie de la l?gislation internationale sur les brevets, celle-l? m?me que les Etats du nord se sont empress?s d’int?grer dans leurs l?gislations domestiques au lendemain de la cr?ation de l’OMC. Au m?me titre, cet Accord doit ?tre transpos? dans les droits nationaux et la r?glementation europ?enne. Ce n’est qu’? ce prix, en r?alit? bien modique, qu’on pourra dire que la donne est peut-?tre en train de changer : un droit, n?cessaire pour les pays du sud, devient un droit commun.




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