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Insurrection of subjugated knowledges against modernist practices.

For a politics of knowledges

Saturday 11 September 2004 by Trussart, Nathalie

reference http://www.imbroglio.be/site/spip.php?article30

What can make doubtful a "savoir" concerns the political sovereignty, which a ’savoir" attempts to benefit. Michel Foucault tried to hunt down some of these cases.


This short text, in french, tests the use of a transversal notion - ‘savoirs douteux’- likely to mark both the specificities of the ‘good cases’ studied by Michel Foucault and the possibilities of continuing thinking politics of knowledge with Foucault with other ‘good cases’. What is doubtful does not concern a scientific content as regarded by a demarcation principle. What is doubtful concerns the political sovereignty, which those ‘savoirs’ attempt to benefit, and that is in return reinforced by their will to make science.

Des savoirs assujettis s’insurgent contre des pratiques modernistes. Vers une politique des savoirs.

? Les g?n?alogies, ce sont tr?s exactement des anti-sciences ? (1) . Michel Foucault interroge la psychanalyse, la s?miologie, le marxisme. En revanche, il ne touche ni ? la physique th?orique, ni ? la chimie organique (2) . Le projet g?n?alogique ne concerne que les sciences des soci?t?s humaines, et semble ne pas pouvoir convenir aux sciences de la nature. Certains lecteurs de Foucault clament que la politique n’est possible qu’? cette condition : la s?paration stricte entre le royaume des objets et le royaume des humains. D’autres la d?plorent, targuant que la constitution d’un monde commun exige la prise en compte de tout ce qui l’habite, humains et non-humains (3). D’autres encore s’en nourrissent, prolongeant les g?n?alogies dans les sciences de la nature (4). Pourtant ces interpr?tations ne rendent pas compte du champ singulier des savoirs dans lequel Foucault a construit sa pens?e. Les bons cas d’?tude de Foucault se caract?risent d’abord en ce qu’ils sont des ‘savoirs douteux’. Cette notion transversale permet-elle de penser, ? partir des travaux de Foucault, les contraintes du politique, par del? la distinction entre humains et non-humains ? C’est cette question qui est ici test?e.

Les g?n?alogies sont des anti-sciences. Elles stimulent les insurrections des savoirs assujettis contre les effets concrets de domination produits par le pouvoir du discours scientifique quand il incarne le mod?le souverain de v?rit? dans nos soci?t?s occidentales. Les g?n?alogies combattent ces effets de pouvoir dont b?n?ficient les pratiques caract?ris?es par leur volont? de faire science, par leur soumission ? la souverainet? ?pist?mologique -qui ne reconna?t qu’un unique mode l?gitime de production de v?rit?- et ? la souverainet? juridique - qui ne reconna?t qu’une seule source de pouvoir : ces pratiques participent ? la production des ‘savoirs douteux’. Les dispositifs de savoir/pouvoir sont les instruments construits pour rendre compte de ces techniques sp?cifiques de production d’?nonc?s de v?rit?. Ils d?ploient leur efficace en prenant acte du fait que la t?te des souverains, juridique et ?pist?mologique, est coup?e. C’est ? ce prix qu’une politique des savoirs est pensable.

Les savoirs douteux de Foucault ont ceci de commun avec les pratiques modernistes d’Isabelle Stengers, qu’ils transforment la sp?cificit? conquise par les sciences modernes en mode de faire souverain, seul appel? ? trancher quel que soit le cas qui lui est soumis. Foucault utilise les dispositifs de savoir/pouvoir exclusivement ? propos des savoirs douteux, afin de laisser voir par o? ils tiennent mal, par o? les savoirs assujettis peuvent s’insurger. Les pratiques modernistes, parce qu’Isabelle Stengers (5) les pose en contraste avec les pratiques modernes, explicitent d’autant mieux cette transformation indue. Lorsqu’elle fait le r?cit de l’invention des sciences modernes autour de la figure du dispositif exp?rimental de Galil?e, il s’agit de mettre en sc?ne les contraintes propres ? ce mode de production de v?rit? sp?cifique. La r?ussite dont nous sommes h?ritiers, l’?nonc? vrai produit par le dispositif, concerne la conqu?te de cette sp?cificit?.

Les savoirs douteux, Foucault les d?non?ait dans le champ des sciences humaines. Autre pouvoir, autre savoir (6). Les effets de pouvoir sont ?galement ? l’œuvre dans les situations d’expertise o? l’on demande aux sciences assistance, fondation et justification de la d?cision politique. Mais aujourd’hui, des controverses publiques, notamment autour des OGMs, montrent des savoirs assujettis se d?sassujettir en s’invitant en politique. Pied dans la porte, ils produisent les contraintes susceptibles de forcer les souverainet?s ? les accueillir. Couper la t?te de nos souverains, tel est le prix d’une politique des savoirs. La phrase pr?sent?e dans cette nudit? est choquante, parce qu’elle fait penser ? des histoires o? il y a "mort d’homme". Pour autant, la souverainet? dont il s’agit de se passer est relative ? des modes d’organisation des pouvoirs, des puissances des savoirs. De fa?on rapide, il s’agit des modes d’organisation hi?rarchique des pouvoirs. Est-ce donc cela dont nous parle Foucault lorsqu’il utilise le terme politique, le difficile probl?me de la composition des puissances , cultiv?es et non r?duites par une hi?rarchie?


NOTES:

(1) Foucault M. (1997). ? Il faut d?fendre la soci?t? ?. Cours au Coll?ge de France. 1976. Paris. Gallimard-Le Seuil, coll. Hautes ?tudes. p. 10.
(2) Par exemple, dans Foucault M.(1994). ? Entretien avec Michel Foucault ?. Dits et ?crits. Vol. III. 1976. n?192. Paris. nrf-Gallimard. p.141.
(3) Latour B. (1993). “An interview with Bruno Latour”. Configurations. 1.2: 247-268.
Latour B. (1999). Politiques de la nature. Comment faire entrer les sciences en d?mocratie. Paris. La D?couverte.
(4) Rouse J. (1993). “Foucault and the natural sciences”. In Caputo J. And Yount M. Foucault and the critique of institutions. Pennsylvanis State University Press. pp. 137-162.
Gutting G. (1999). Michel Foucault’s archeology of scientific reason. Cambridge. Cambridge University Press.
(5) Stengers I. (1996) Cosmopolitiques. Vol. 1. La Guerre des sciences. Paris. La D?couverte/Les Emp?cheurs de penser en rond. p.126
Stengers I. (1997). Cosmopolitiques. Vol. 7. Pour en finir avec la tol?rance. La D?couverte/Les Emp?cheurs de penser en rond. p.13 et svtes.
(6) Foucault M. (1975). Surveiller et Punir. Naissance de la prison. Paris. Gallimard. p.263.
? Autre pouvoir, autre savoir ?. Foucault utilise cette formule lorsqu’il marque un contraste entre les sciences de la nature et les sciences humaines. Deux points importants m?ritent d’?tre soulign?s. Premi?rement, Foucault indique que la sp?cificit? conquise par les sciences de la nature concerne leur d?tachement de la proc?dure inquisitoriale o? historiquement elles se sont enracin?es. Si l’enqu?te est la matrice de savoir-pouvoir commune ? une technologie politico-juridique et ? une technique form?e pour les sciences empiriques, ces derni?res ont gagn? l’autonomie de leur savoir par rapport ? ce pouvoir d’enqu?te qui les a rendues possible. En revanche, les sciences humaines n’ont pas encore conquis l’autonomie de leur savoir d’examen. Elles restent enti?rement au service du pouvoir disciplinaire o? historiquement elles se sont enracin?es. C’est en cela qu’elles sont douteuses. Foucault signe donc la r?ussite d’un savoir ? sa capacit? de se d?tacher du pouvoir qui l’a rendu possible. Si les g?n?alogies des imbroglios de savoir-pouvoir sont men?es, ce n’est pas au nom de l’in?vitable confusions des savoirs et des pouvoirs. C’est bien plut?t au nom des autonomies gagn?es par certains savoirs, contre les autonomies usurp?es par d’autres. Deuxi?mement, Foucault cite la figure historique de Bacon pour rendre compte de cette autonomie gagn?e par les sciences de la nature. Or les travaux de Bacon sont incapables d’expliquer les libert?s prises par les sciences de la nature. Foucault n’a pas pens? les sciences de la nature. C’est un fait commun?ment admis. Mais cette utilisation mal pens?e de la figure de Bacon est peut-?tre ce qui a permis certaines continuations des travaux de Foucault dans les sciences de la nature sur un mode exclusivement d?nonciateur, d?non?ant toute forme d’autonomie des savoirs au nom des imbroglios ind?passables de savoir-pouvoir. Faire travailler la pens?e de Foucault dans les sciences exp?rimentales autour de la notion de g?ne implique d?s lors de faire vivre ce contraste entre autonomie gagn?e et autonomie usurp?e, entre pratiques modernes et pratiques modernistes. ? Quelles sont les g?n?alogies de vos autonomies ? ?




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How is political sovereignty reinforced by epistemological sovereignty?

keywords

epistemology , knowledge , politics , power , sovereignty

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